Prudence sur une hausse générale des salaires : la FER et Arnaud Bürgin ajustent le cadre du débat

Le débat sur une éventuelle augmentation salariale l’an prochain, évoquant une hausse de l’ordre de 2% à 2,5%, mobilise les acteurs du monde du travail. UNIA réclame une progression des salaires, arguant que les crises récentes ont freiné les augmentations alors que l’économie reste globalement dynamique. Du côté patronal, la prudence demeure de mise.
Position de la FER face à une hausse générale
Arnaud Bürgin, nouveau directeur de la Fédération des entreprises romandes (FER) à Genève, se dit disposé à dialoguer avec les partenaires sociaux, mais exclut d’envisager une hausse générale des salaires. Il rappelle qu’on traverse une période économique complexe pour les entreprises, avec une visibilité limitée même sur six mois, et affirme qu’il est actuellement difficile d’entrer en matière sur une augmentation générale de 2% à 2,5%.
Selon lui, le contexte actuel est freiné par le Covid, la crise énergétique liée au conflit en Ukraine et les droits de douane américains. Il mentionne notamment les taxes de 39% instaurées par Donald Trump comme un facteur pesant sur l’économie exportatrice, en particulier dans l’Arc jurassien, où certaines entreprises, notamment horlogères, envisagent déjà des mesures de chômage partiel.
Pour la FER, les négociations devraient se dérouler par branches, comme cela se pratique traditionnellement en Suisse, et seules les branches qui affichent de bonnes performances pourraient envisager des hausses.
Écarts salariaux et rémunération des dirigeants
UNIA met aussi en avant les écarts importants entre les salaires des employés et ceux des dirigeants, citant l’exemple de Novartis où le PDG toucherait jusqu’à 333 fois le salaire le moins bien rémunéré. Le directeur de la FER relativise en évoquant des fonctions extrêmement élevées, rappelant que le PDG de Novartis supervise 76 000 employés et génère un chiffre d’affaires de 44 milliards, et précisant qu’une grande partie de cette rémunération est variable en fonction de l’atteinte des objectifs, tout en soulignant le niveau élevé de formation requis.
Par ailleurs, Bürgin rappelle que la plupart des actionnaires des grandes entreprises sont des caisses de pension, des actionnaires institutionnels, c’est‑à‑dire des retraites collectives, et il affirme que cela peut, à terme, bénéficier aux régimes de retraite.
Salaire minimum et débats politiques
Le sujet du salaire minimum demeure vif. Une loi en discussion à Berne pourrait faire prévaloir les conventions collectives nationales sur les salaires minimaux cantonaux, comme à Genève (environ 25 francs/heure). Si cette loi est adoptée, certains salariés pourraient ne pas être mieux rémunérés lorsque les CCT prévoient des conditions moins avantageuses. Bürgin soutient que les salaires minimaux pénalisent les entreprises en créant une distorsion de concurrence et pourraient limiter les échanges entre partenaires sociaux, piliers de la cohésion suisse.
Le directeur de la FER rappelle aussi que des effets pervers sur les prix pourraient se faire sentir: avec un plancher à 4500 francs, les prix augmentent dans certains secteurs, ce qui pousse des Genevois à faire leurs courses en France.
Risque pour les entreprises et actions proposées
Au‑delà des questions salariales, la FER alerte sur la fragilité de certaines entreprises. Beaucoup ont anticipé en envoyant des stocks vers les États‑Unis, mais ces réserves devraient s’épuiser à partir de janvier 2026, ce qui pourrait entraîner des vagues de chômage partiel à l’échelle nationale.
La réponse du Conseil fédéral à ce stade est le chômage partiel. Pour Arnaud Bürgin, il faut toutefois aller au‑delà et poursuivre les négociations avec les États‑Unis, simplifier les démarches à l’export, créer des guichets uniques et soutenir les entreprises dans l’exploration de nouveaux marchés.
Propos recueillis par Pietro Bugnon. Texte pour le web : Fabien Grenon.