Malgré le recul territorial, l’État islamique demeure l’acteur djihadiste le plus meurtrier du terrorisme mondial
Mutation du djihadisme et persistance des attaques
Selon l’étude intitulée les attentats islamistes dans le monde de 1979 à 2024, publiée par la Fondation pour l’innovation politique, 40% des victimes du terrorisme mondial meurent lors d’attentats djihadistes et l’immense majorité de ces victimes est musulmane.
Une transformation du paysage et une menace résiduelle
Wassim Nasr, journaliste à France 24 et chercheur au Soufan Center à New York, rappelle que ces dernières années le terrorisme djihadiste a connu de profondes mutations. Bien que l’État islamique ne contrôle plus de vastes territoires comme à l’époque du califat entre 2013 et 2019, ses attaques se poursuivent, mais leur impact est moindre que par le passé.
« Ils ont encore une capacité de nuisance, purement terroriste, avec des attentats comme on en a vu par exemple contre l’église Sainte-Elie à Damas », déclare-t-il dans l’émission Tout un Monde. « Mais la pression militaire de la coalition, en particulier des Américains, est très forte. Elle empêche le groupe EI de se regrouper comme on l’a vu faire, en tout cas en 2013-2014 », ajoute-t-il.
Afrique comme nouvelle base d’opérations
Selon Nasr, la présence territoriale structurée dans la zone Levant est révolue. Aujourd’hui, le groupe EI, tout comme Al-Qaïda, a déplacé l’épicentre de ses activités en Afrique, le Nigeria étant l’endroit où il est le plus implanté.
« Il ne faut pas imaginer qu’il y a un grand ordonnateur quelque part en Irak, en Syrie ou en Afghanistan, qui est dans le détail des plans de ce qui se fait sur le terrain », rappelle-t-il.
Cette présence sur le continent africain constitue un danger direct pour les Occidentaux, comme en témoignent les enlèvements récents au Niger. « L’État islamique détient aujourd’hui une ressortissante suisse, une ressortissante autrichienne et un ressortissant américain, tous les trois pris au Niger », précise Nasr.
Le journaliste rappelle également que des attaques en Europe ont été préparées via l’Afrique. Il n’existe toutefois pas d’organisation ou d’autorité centrale : « Le propre des organisations djihadistes, c’est de donner une directive à chaque filiale qui l’applique avec ses propres moyens. Il ne faut pas imaginer qu’il y ait un grand ordonnateur quelque part en Irak, en Syrie ou en Afghanistan, qui est dans le détail des plans de ce qui se fait sur le terrain », insiste-t-il.
Gaza, l’inconnu post-conflit
Interrogé sur le risque que la guerre à Gaza crée un terreau favorable au djihadisme, Wassim Nasr répond que l’après-conflit reste une zone d’incertitude : « Nous entrons dans l’inconnu », affirme-t-il.
« Nous pensons que si le Hamas est complètement détruit, désarmé, cela va s’arrêter là, mais nous ne savons pas ce qui peut resurger derrière ». Selon lui, rien ne garantit la fin des violences et des groupes encore plus radicaux pourraient émerger. Il rappelle aussi que le Hamas, tout terroriste qu’il est, combattait des djihadistes encore plus durs que lui, parfois avec l’aide d’Israël et de l’Égypte.
Il insiste enfin sur l’imprévisibilité de l’avenir de Gaza et de sa jeunesse, et note que certains pays restent réticents à envoyer une force d’interposition dans la région.